La femme se retourna brusquement. Son bras, encore levé, fit basculer la coiffe de lin qui tomba à terre, libérant l’épaisse natte couleur de soie claire.

-    Marjolaine! souffla Hughes pétrifié. Elle, ici?

-    Mais oui, dit Pernette très satisfaite. Ni elle ni Aveline n’ont jamais été plus loin que Rochella. Nous n’avons pas voulu, Pierre et moi, qu’elle s’en aille seule vers Dieu sait quel destin. Le couvent ne lui apparaissait plus que comme un pis-aller, nous l’avons bien compris. Et puisqu’une vie modeste ne lui faisait pas peur. Elle dit qu’elle retrouve ici son enfance.

Là-bas, Marjolaine s’était figée, elle aussi. Le cœur cognant lourdement dans sa poitrine, elle regardait la haute silhouette sombre qui accompagnait son amie. Lentement, d’un pas hésitant, elle s’avança un peu dans les hautes herbes qui s’attachaient à sa robe comme pour la défendre d’une illusion dont le réveil serait cruel. Tant de fois, elle avait rêvé de le revoir.

Alors, ce fut Hughes qui s’élança.

Pernette les regarda se rejoindre, s’étreindre, ne plus faire qu’une seule silhouette, corps confondus, ivres d’une joie si forte qu’elle semblait les envelopper de lumière. Ils n’avaient plus besoin de personne au monde.

Alors, reprenant la cruche abandonnée par Hughes, Pernette rentra dans sa maison.


Fin